En 1974 paraissait dans la déjà fameuse collection «Ailleurs & Demain» dirigée par Gérard Klein chez Robert Laffont Le Temps Incertain, le livre d'un faux débutant dans la SF nommé Michel Jeury, qui avait déjà publié des années plus tôt et sous le pseudonyme d'Albert Higon deux romans de SF au «Rayon Fantastique». Je m'en souviens encore, à la Convention européenne de Grenoble cette année-là, Jeury était LA vedette, même si cette soudaine notoriété semblait par moment le mettre un peu mal à l'aise.
Brillant traitement du thème du voyage temporel (à défaut d'être toujours compréhensible par le lecteur moyen...) Le Temps Incertain est l'un des livres majeurs de la SF française des années 1970, elle qui en compta si peu à cette époque où certains tentèrent trop longtemps de faire croire qu'un engagement politique à l'extrême-gauche plus dix joints grillés par jour pouvaient faire office de talent littéraire. Depuis, l'histoire a tranché ; Jeury est resté au panthéon de la SF (qu'il a désertée depuis les années 1990 pour les terres financièrement plus rentables du roman historico-familial et du «terroir»), nos gauchistes hystériques ont disparu de la circulation et la SF française a mis 15 ans pour retrouver une crédibilité auprès des lecteurs...
Ce qu'on sait moins, c'est que Le Temps Incertain a été publié sous le titre de Chronolysis aux USA en 1980 chez Macmillan, traduit par Maxim Jakubowski, préfacé par Theodore Sturgeon (oui !) et dans une édition cartonnée avec jaquette reproduite ici. Et si je rappelle cette performance éditoriale, c'est à la fois parce que je viens de trouver le livre aujourd'hui dans un magasin de l'Armée du Salut à Montréal et parce que je me suis dit que c'était aussi une pièce à verser au débat ouvert par l'incontournable site ActuSF (http://www.actusf.com/php/modify.php?articleID=4641) sur les problèmes qu'ont les auteurs français à se faire traduire en anglais...
RDN