Claude Ecken est depuis des années un des auteurs les plus intéressants de la SF française moderne (voir par exemple son recueil Le Monde, tous droits réservés aux éditions du Bélial, 2005) avec ses récits à la tonalité proche de la hard-science mais qui n'oublient jamais l'élément humain. C'est aussi, et depuis des décennies, un spécialiste de la BD, mais s'il avait déjà publié quelques albums ici ou là, il lui manquait encore l'oeuvre qui le ferait enfin remarquer au milieu du torrent de publications annuel du genre.
Avec Les chants de l'air, le premier tome de la trilogie Murel qui vient de sortir aux Éditions EP (Emmanuel Petit) début 2007, il semble qu'il tienne enfin le bon bout de ce côté-là.
Dans Murel, il concilie en effet, et enfin, ses ambitions littéraires dans la SF avec cette BD qu'il avait eu jusque-là du mal à dompter à son profit. Cette trilogie s'annonce comme un mélange bien équilibré de Space Opera, d'espionnage et d'histoire High Tech qui se saisit de l'attention du lecteur dès que celui-ci a intégré les noms un peu compliqués des personnages qui empêchent de se concentrer totalement sur l'intrique dans les toutes première planches («Ah ! mais bon sang, c'est qui déjà, celui-là?»). Fausses pistes, mystère et suspense alimentent ensuite le plaisir de ce même lecteur qui ne peut qu'en redemander une fois ce premier volume refermé sur un cliffhanger, comme on dit dans le jargon franglais des séries TV.
Mais un bon scénario qui n'est pas soutenu par un dessin à la hauteur, c'est le crash assuré dans l'univers impitoyable de la BD où le visuel est d'une importance capitale. Claude Ecken en avait fait l'amère expérience avec une précédente série, historique cette fois (la peste de 1720 à Marseille), Le diable au port (3 tomes, 2002 à 2004), dessinée par Benoît Lacou. Or, divine surprise, c'est justement ce même Benoît Lacou qu'on retrouve ici, cette fois libéré et en pleine forme dans cet univers extra-terrestre peuplé de personnages mi-animaux mi-humanoïdes...! Son dessin en couleur directe colle très bien au scénario et trouve ici une vigueur et un dynamisme à des lieues de sa prestation guère enthousiasmante sur la peste de Marseille.
À déguster sans délai.
RDN